dimanche 6 mars 2011

Garden of evil (Henry Hathaway, 1954)

Bertrand Tavernier, dans les bonus du DVD, confesse placer ce film parmi les 15 westerns majeurs et énonce avec conviction tout ce qui fait du Jardin du diable un film d'élection : le scénario, l'interprétation, la rudesse et la beauté des extérieurs. J'aurai plutôt tendance à lui emboîter le pas (moi aussi, j'apprécie la tension croissante distillée par le scénario de Fenton, les admirables plans larges crépusculaires qu' Hathaway avait pu apprécier chez Fleming lorsqu'il n' était que simple assistant, l'absence de péripéties détournant le spectateur du véritable enjeu du film (l'insatiable cupidité des hommes), la violence abrupte des scènes d'action) même si je suis plus circonspect sur les deux rôles principaux. Cooper que je préfère malgré tout ici que chez Lubitsch est moins enthousiasmant que dans mon souvenir (mais son personnage de shérif en quête de rédemption n'est pas très intéressant comparé à celui de Fiske (Richard Widmark, épatant comme toujours en joueur désabusé)) et Susan Hayward dans un rôle en or (une femme libre tiraillée entre un mari ingrat et des aventuriers guère recommandables) multiplie les mouvements de tête intempestifs comme si Lee Strasberg lui dictait son jeu.
Non, ce qui pour moi fait la singularité de ce film et qu'étonnamment Bertrand Tavernier passe sous silence, c'est la musique de Bernard Herrmann, sa seule incursion dans le domaine du western. Herrmann, sous haute influence straussienne et en particulier l'opéra Salomé (il suffit de comparer le prélude du film illustré par le plan ci-dessus et les divagations (écouter à 40 secondes de l'extrait) de l'héroïne post-romantique pour en avoir le coeur net ), compose une partition torturée faisant de chaque passage d'obstacle (en particulier les plans magnifiques sur la corniche) une odyssée métaphysique. En ajoutant ce poids fatidique au film, Herrmann donne au film d'Hathaway une dimension philosophique passionnante. Il ne s'agit plus simplement de 4 intrigants à la recherche d'une hypothétique récompense mais d'hommes seuls confrontés à la précarité de leurs destins.
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2 commentaires:

  1. effectivement, la musique d'Hermann est un des plus de ce qui reste à mes yeux un western de bonne facture. Mais sans plus.
    Tout y respire la convention à commencer par la pseudo-complexité des caractères et la non moins pseudo-originalité du lieu. C'est Hathaway quoi, c'est pas Anthony Mann...
    Ca reste un film plaisant mais j'ai du mal à considérer l'engouement qu'il peut suciter chez certains amateurs le mettant au même niveau que des chefs d'oeuvre de Mann, Daves ou Hawks.

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  2. Tout y respire la convention : je te trouve bien sévère ! Les mexicains y sont par exemple beaucoup moins caricaturaux qu'ailleurs, Leah est un personnage ambigu mû à la fois par des motifs vénaux mais capable d'une vraie générosité et la violence sèche des scènes d'action est très réussie.

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