samedi 12 février 2011

The Adventures of Robin Hood (William Keighley, Michael Curtiz, 1938)

C'est une question qui hante de nombreux cinéphiles : jusqu'où ces deux-là ont-ils été et quelle fut l'exacte nature de leur relation ? L'un des plus célèbres duos hollywoodiens de tous les temps (8 films en seulement 6 ans) fut-il davantage qu'un couple mythique à l'écran ?
Olivia de Havilland éprouva indéniablement pour le bel australien une attirance proche du coup de foudre sur le tournage de Captain Blood et Flynn ne fut pas insensible au charme de ses grands yeux juvéniles (rappelons qu'elle avait sept ans de moins que lui et moins de 20 ans au moment de leur premier film ensemble). Pour jouer avec constance les ingénues, Livvie n'en était cependant pas une et elle sentait confusément qu'une aventure avec une homme marié (Flynn était l'époux d'une actrice française sur le déclin, Lili Damita) aurait des effets déplorables sur la poursuite de sa carrière (ce qui restera d'ailleurs pendant très longtemps sa seule priorité). Dans le même temps, le diable de Tasmanie avait une façon bien à lui de montrer son affection. Sur le tournage de The charge of the light brigade, il multiplia les blagues à son encontre (comme glisser un serpent mort dans son paquetage) et sur Robin Hood, il n'hésita pas à lui saboter sa belle tirade du banquet dans la forêt de Sherwood en agitant nerveusement une brindille espiègle. Au contraire de ce que Flynn espérait, cela l'éloigna d'Olivia. Elle fut blessée par ces mauvaises manières et décida de lui jouer un tour à sa façon.
Avant d'aller plus loin, il faut, au préalable, replacer la scène dans son contexte. Sur l'insistance de Flynn, la réalisation de The adventures of Robin Hood avait été confiée à William Keighley (avec lequel il avait déjà tourné The Prince and the Pauper en 1937), un metteur en scène plus souple et plus amical que l'irascible Curtiz*. Oui mais voilà, Keighley avait accumulé les retards et ne s'était pas montré à la hauteur des espérances du producteur Hal Wallis en matière d'énergie et de mise en place des scènes de foule. Il fut donc débarqué et remplacé par le hongrois tyrannique qui en profita pour retourner quelques scènes dont Wallis n'était pas satisfait et notamment la scène d'amour entre Lady Marian et Robin après l'évasion du gibet. Curtiz ni Flynn n'étant du genre à s'attendrir, la séquence fut expédiée en moins de deux minutes (avec notamment un plan de coupe tourné antérieurement et en complet décalage par rapport au décor) avec simplement le plaisir de voir Errol et Livvie s'embrasser à pleine bouche (ce qui était très peu fréquent à l'époque). Selon la future Melanie de Gone with the wind, la scène préalablement tournée (et hélas, hélas, hélas, irrémédiablement perdue depuis) par Keighley était beaucoup plus tendre et sensuelle, l'occasion pour elle de rendre la monnaie de sa pièce à son si taquin partenaire. Laissons-lui maintenant la parole : "And so we had one kissing scene, which I looked forward to with great delight. I remember I blew every take, at least six in a row, maybe seven, maybe eight, and we had to kiss all over again. And Errol Flynn got really rather uncomfortable, and he had, if I may say so, a little trouble with his tights." Le message était on ne peut plus clair : Here's what you're missing, big boy !

* : Dans leur justement célèbre 50 ans de cinéma américain, Tavernier et Coursodon opposent le travail de Keighley et de Curtiz donnant tout le crédit du film au hongrois (et effectivement, le duel final (ah, ces jeux d'ombre !) est une splendeur !). Je serai moins sévère qu'eux avec Keighley qui dans un style plus détendu, réussit parfaitement toutes les scènes où Robin assemble sa troupe (j'ai un gros faible pour la séquence avec Friar Tuck (merveilleux Eugene Palette!))

4 commentaires:

  1. Un bien beau texte pour un magnifique film ; j'aime bien votre façon de vous attarder sur la relation Flynn/De Havilland, qui forment un couple tellement évident que cela en devient intrigant...

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  2. Robin Hood est un des très rares films qui fascinent autant à 8 qu'à 44 ans !
    Attraction physique, identité de destins, jalousie professionnelle, l'appariement de ces deux légendes n'en finit pas de me passionner. Je me permets de vous conseiller une lecture stimulante sur la question : http://www.amazon.com/Errol-Olivia-Obsession-Golden-Hollywood/dp/097116858X/ref=sr_1_6?s=books&ie=UTF8&qid=1286397793&sr=1-6

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  3. Je ne connaissais pas, et l'envie est très forte pour que je passe commande ! Je ne sais pas, par contre, si mon niveau d'anglais, tout correct qu'il soit, me suffira à apprécier l'ouvrage...

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  4. C'est lisible avec un petit niveau lycée, il me semble ! Et l'iconographie est à tomber !

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